Bonjour Laurent,
J’ai lu avec intérêt vos messages sur le gréement Gallant, que son concepteur Jack Manners-Spencer a appelé ensuite Autosail. Je suis intéressé par ce gréement, depuis le premier article de L.N. en 1991.
Depuis j’ai essayé de suivre les évolutions, et les avis sur le gréement Gallant, qui pour moi appartient à la famille des gréement de jonque, avec l’avantage qu’il n’y a plus de "bon bord" et de" mauvais bord" en raison de la symétrie du profil.
J’apprécie la facilité à réduire cette voilure, à faire virements de bord et empannages, la facilité de réglage, la simplification à l’extrème du gréement dormant grâce aux mats non haubannés.
Les photos que vous avez publiées d’un Gallant 29 toujours en activité, montrent que ce géement est fiable, marin, et suffisamment performant pour ne pas avoir été remplacé, ou pour que le bateau soit encore utilisé après 30 ans. Les développements en cours de voiles gonflables à profil symétrique et sans volet (WISAMO, IWS) peuvent être considérés comme des évolutions du gréement Gallant.
Je ne dis pas que c’est le grément idéal, il est évident qu’il n’a pas eu de succès commecial, le nombre de modèles construits se compte sur les doigts d’une seule main, mais il a un potentiel d’amélioration.
Le géement Gallant originel est mauvais au près et par petit temps, en raison du profil symétrique utilisé, et de la simplicité recherchée. En technique, tout n’est qu’une affaire de compromis, au final tout dépend du type de navigation que l’on veut pratiquer : le gréement Gallant n’est pas fait pour la régate, ni la course-croisière, ni pour battre des records... La meilleure allure du gréement Gallant est le vent de travers où à surface et allongement égaux, il est peut être supérieur au gréement marconi. Les voiles à cambrure variable, à plusieurs volets, le gréement Omer sont meilleurs que le gréement Gallant à toutes les allures, mais au détriment de la simplicité, du coût, et de la robustesse.
Ce qui m’intéresse, c’est d’atténuer les défauts du Gallant afin de les rendre acceptables, car si le gréement Gallant originel est moins bon au près que d’autres gréements, il conserve une portance résiduelle jusqu’à des angles très faibles de 6-15°, ce qui n’est pas le cas du gréement marconi limité à 25-30° : ce n’est pas inutile dans des conditions de navigation critiques. J’ai cherché ce qui pourrait améliorer les performances au près, et par petit temps. J’ai remarqué que les voiles Gallant réalisées avaient un allongement faible, et que Jack Manners-Spencer recommandait d’utiliser le profil NACA 0015, profil mis au point dans les années 1930 pour des avions, et adapté à un nombre de Reynolds plus élevé (grandes vitesses et/ou grandes dimensions) que celui rencontré dans la navigation à voile.
- Allongement faible : il est probablement du aux matériaux existants pour les mats à la fin des années 80. Aujourd’hui les mats en composite epoxy-carbone permettent de faire mieux, à un prix accessible.
Un allongement plus important permet d’augmenter la finesse, et la portance maximale, et ce qui caractérise la performance d’un gréement c’est sa finesse. Une finesse plus élevée signifie moins de gite et de dérive pour une portance donnée. C’est la démarche suivie par le gréement WISAMO-IWS développé par Michelin, et par Jack Manners-Spencer pour ses derniers projets :
http://pisuperyachts.com/dragonship-80.html- Profil : Il y a maintenant des profils pour faibles Reynolds : profils pour planeurs, pour vol musculaire, pour vol acrobatique, pour maquettes radio-commandées, pour drones. En 1980 le NACA 0015 était un bon choix, en 2023 il y a mieux : profils Eppler, Selig, Elkaim, NASA, dont certains ont des finesses meilleures de 15-20% que le NACA 0015, et sur un domaine de Reynolds plus étendu.
Le Cameleon de Jack Manners-Spencer avait un profil NACA 0015, mais, probablement pour des raisons de facilité de réalisation, il y avait une fente au bord d’attaque qui diminue les perfomances, elle a été supprimée sur Gallant 29 et projets suivants. Quand Bertrand Fercot en 2013 a testé, puis abandonné le gréement Gallant sur son Grand Pha, il a utilisé un profil moins efficace que le NACA00 15, et qui sur un avion ne lui aurait probablement pas permis de voler, dommage que Bertrand Fercot n’ait pas été conseillé sur les profils aérodynamiques.
- Forme en plan : la forme elliptique utilisée par Manners-Spencer à l’origine, a la zone en tête de mât non efficace en raison du très faible nombre de Reynolds. Une forme elliptique tronquée est plus adaptée pour des voiles, c’est aussi l’évolution récente du gréement marconi avec la ré-apparition de "cornes".